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374 Les Québecois éjectent Charest

mercredi 05 septembre 2012 • 20:52 (CEST)

J'avais pensé, pour le titre de ce billet, à quelque chose de plus imagé, par exemple Les Québecois mettent une grosse mandale à Charest ou encore Charest sorti par les Québecois à grands coups de pied dans le derrière. Ou bien pour faire plus couleur locale, Charest s'en est fait crisser une... mais finalement, ça n'aurait pas été très gentil.

Pauline Marois... par Marie Berne. Cliquez pour l'image originale.
Pauline Marois et Léo Bureau-Blouin à Laval, Québec le 11 août 2012
(cc)-by-nc-nd Marie Berne

Alternance — C'est pourtant bien ce qui s'est passé hier à l'occasion des élections générales qui ont eu lieu au Québec. Élections qui ont vu le retour du parti québecois (PQ) aux affaires, dont ils avaient été écartés par le parti libéral québecois (PLQ) de Jean Charest en 2003. C'est la chef péquiste Pauline Marois qui prend les rênes de la province. Parfois surnomée ministre polyvalente, Pauline Marois est une vielle routarde (au sens figuré, bien sûr) de la politique québecoise : elle a siégé dans tous les cabinets péquistes depuis 1994, à des postes aussi divers que variés, depuis le secrétariat à la condition féminine jusqu'au poste de ministre des finances en passant par l'éducation et la santé. C'est à elle que les Québecois doivent par exemple la généralisation de la maternelle à temps plein. Pour autant, le PQ devra se contenter d'un gouvernement minoritaire, ne disposant que d'une majorité relative à l'Assemblée nationale québécoise (54 sièges sur 125).

La baffe — Elle est pour Jean Charest, le premier ministre sortant après 9 ans de pouvoir. De façon assez surprenante, le PLQ a réalisé un score bien au delà des projections, dans la fourchette optimiste des analystes. En remportant 50 sièges, à moins de 2 points en voix du PQ, les libéraux seront une opposition forte aux péquistes. Non, si je parle de baffe, c'est parce que Charest a été battu dans sa circonscription de Sherbrooke, où il était élu depuis 28 ans sans discontinuer, et avec un écart de près de 3000 voix (sur 35000 bulletins environ), ce qui n'est quand même pas rien. Pour rappel, le système de scrutin utilisé est uninominal majoritaire à un tour (« first past the post »).

Les jeunes surveillent... ou pas ? — Je ne prétends pas être un expert en politique québecoise, et je ne vais pas me risquer à faire des analyses douteuses tant sur ce résultat que sur les défis qui attendent le nouveau gouvernement : il y a Radio-Canada et La Presse pour ça. Je voudrais juste revenir sur le contexte récent : la crise étudiante dont Séb, mon canadien préféré, a parlé ici et aussi . Or, la réaction du gouvernement, à savoir faire voter une loi spéciale restreignant notamment le droit de manifestation, n'a pas été très appropriée et d'ailleurs, c'était assez rigolo vu d'ici : chaque Français sait qu'il ne faut surtout pas faire n'importe quoi avec les étudiants et que les conflits tournent rarement à l'avantage du gouvernement. Quoi qu'il en soit, il existe une possibilité que les jeunes se soient mobilisés pour cette élection, encouragés par le contexte et malgré la pente descendante de la participation des jeunes au Québec. Ce qui serait illustré par l'élection de Léo Bureau-Blouin, l'un des médiatiques leaders de la contestation, malgré les inquiétudes parfois suscitées par son jeune âge (à 20 ans, il devient le plus jeune député de l'histoire de l'Assemblée nationale québecoise). Néanmoins, Libération note que les points chauds de la contestation étudiante ont aussi été ceux où le PLQ a obtenu ses meilleurs scores : on pourrait donc assister à une fracture générationelle en cas de nouvelle crise ultérieure. Car le PQ aura une marge de manœuvre plutôt réduite et risque de voir les libéraux et caquistes (CAQ, centre-droit, 19 sièges) provoquer des élections anticipées d'ici quelques mois. Quoi qu'il en soit, les fédérations étudiantes auront le PQ à l'œil.

À charge maintenant pour Pauline Marois de ne pas se tromper sur les questions qui concernent les jeunes — lors de son dernier point presse, elle confirme son intention d'annuler la hausse des frais de scolarité (et les ré-indexer sur l'inflation) et abroger la loi spéciale.

En bonus — comme pour bien montrer que là bas comme ailleurs, la droite conservatrice abrite un certain nombre de boulets, le parti conservateur du Québec (PCQ) a dû s'excuser après avoir publié sur sa page Facebook un commentaire selon lequel Pauline Marois devait « prendre le blâme » pour la fusillade survenue mardi soir au Metropolis, où avait lieu le meeting post-électoral du PQ. Naturellement, leur excuse est le classique coup du commentaire mal interprété... Ben voyons !